Soudain, un courant d'air fit claquer la porte ; je suis allée me promener le long du Gange sur lequel s'émiettait un croissant de lune. Ils pensaient que personne ne les voyaient ; ils étaient aussi beaux que ces deux amants de Varanasi ; ceux-là étaient malgaches, je les avais jalousement observés danser des heures durant ; ils avaient le rythme dans la peau, se trémoussaient, sautaient, valsaient, leurs pubis semblaient aimantés l'un à l'autre. La case à Nono, cette boîte en bambou et palmier tressé, au plafond de laquelle pendaient des guirlandes de Noël lumineuses et des bouées gonflées, sentait la sueur, le renfermé, l'alcool, des effluves sauvages qui m'ont fait tourner la tête. Je suis sortie me dessaouler dehors, rafraîchir mes pieds engourdis par les danses frénétiques dans l'eau de mer. Ils étaient là sur une langue de sable, entre deux troncs de palmier tordus qui s'entrelaçaient, ils pensaient qu'on ne les voyait pas ; mais leurs halètements et leurs épaules luisantes sur lesquelles s'étalait des étoiles avaient trahi leur présence ; il la prenait en levrette avec vigueur, elle roucoulait de plaisir, ses lèvres bombées en redemandaient encore, ils étaient jeunes, ils étaient beaux, un crabe m'a mordu le pied, j'ai filé, vite, à la case à Nono, pour japper ma douleur au milieu des cris de joie.
suite...